lundi 22 avril 2013

Des trous dans les godasses


Les godasses, elles trouvent jamais leur place en dehors du pied. Quand on se déchausse, on les range, on les planque, c’est pour ça qu’il existe des meubles à chaussures, ou on les relègue dans un coin, on les baratte sous un meuble, on les envoie en périphérie. Une chaussure au milieu d’une pièce, on se prend les pieds dedans.
Sans doute, parce que c’est l’objet qui nous raccroche au sol, à la terre, à notre pesanteur, à notre propre contrainte, outre les fétichistes, c’est un des objets les moins respecté de notre petit monde matériel.

Des pompes qui traînent ça fait toujours désordre. Sans doute parce que c’est le vêtement, quand il est hors de sa fonction, le plus informe qui soit : deux masses disgracieuses, cabossées, tannées, parfois crottées, des languettes, des lacets nonchalamment défaits, deux bouches béantes.
Ce volume ne s’accorde pas avec l’environnement orthonormé et tramé composé par l’espace de l’habitat : les murs, les coins, les meubles, les plinthes, les lattes de parquet, la trame d’un carrelage …

Dans ce décor, elles dévoilent leur creux, découpent deux formes noires, comme deux yeux qui nous regardent. Elles exposent leur profondeur indéterminée, insondable, comme si elles creusaient un trou dans l’espace de la pièce, l’élargissant de deux petits appendices. 






Texte et croquis de

1 commentaire:

  1. Anonyme23.5.13

    Nos godasses à nous, elles sont alignées soigneusement sous la longue étagère de la chambre. D'ailleurs, je n'aime pas qu'elles soient dans la chambre mais il n'y a pas de place dans l'entrée. On ne sait pas trop bien si elles sont cachées ou en exposition.
    /marmit.

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